Etude du potentiel d’évolution des bâtiments
Éviter les démolitions, lorsqu’un autre usage est possible pour le bâti existant, et améliorer la conception des bâtiments en vue de leur mutabilité dès la construction, tels sont les objectifs poursuivis par la mise en place d’une nouvelle obligation “d’étude du potentiel d’évolution” des bâtiments avant leur construction et démolition. Périmètre, contenu, compétences des organismes auxquels peut-être confiée la réalisation de l’étude sont détaillés dans un décret soumis à consultation jusqu’au 8 janvier prochain.
Le ministère de la Transition écologique soumet à consultation publique, jusqu’au 8 janvier prochain, un projet de décret relatif à l’étude du potentiel de changement de destination et d’évolution préalable aux travaux de construction et de démolition d’un bâtiment. La loi Climat et Résilience (article 224) a en effet instauré – en théorie à compter du 1er janvier 2023 – l’obligation d’étude du potentiel d’évolution de certains bâtiments avant leur construction et démolition. Ce nouvel outil destiné à faciliter la réversibilité du bâti – directement inspiré des propositions de la Convention citoyenne pour le climat au titre de la lutte contre l’artificialisation des sols – doit tout à la fois réduire le nombre de démolitions, “fortement génératrices de déchets”, et inciter à l’intégration, dès la phase de conception, d’une possible transformation ultérieure du bâtiment.
Il s’agit “d’encourager et développer le changement de destination et permettre l’évolution du bâtiment (en termes de gabarit notamment) afin d’éviter sa démolition, d’augmenter globalement sa durée de vie et de minimiser les travaux de rénovation lourde ou de transformation”, précise la notice de consultation. Deux articles ont ainsi été introduits au sein du code de la construction et de l’habitation (CCH) : l’un (L.122-1-1) prévoit la réalisation d’une étude du potentiel de changement de destination et d’évolution (y compris par surélévation) avant construction ; l’autre (L.126-35-1) impose au maître d’ouvrage la réalisation d’une étude identique avant démolition d’un bâtiment soumis au diagnostic réformé par la loi Agec dit “PEMD” (produits, équipements, matériaux, déchets) prévu à l’article L.126-34 du CCH.
Cas de la construction neuve
Le périmètre de l’étude pré-construction est restreint aux bâtiments à usage majoritaire d’habitation ou de bureau dont la surface de plancher créée est supérieure ou égale à 5.000 mètres carrés ; aux bâtiments à usage de stationnement (hors stationnement souterrain) associés à ces bâtiments ; aux bâtiments à usage de stationnement (hors stationnement souterrain) de plus de 50 places. Selon le ministère, il convient de “faciliter une montée progressive en compétence des maîtres d’ouvrage et des personnes chargées de réaliser l’étude”, et de “limiter le coût généré par la réalisation d’une étude pour les maîtres d’ouvrage et s’adapter aux caractéristiques du marché immobilier”. “Cela représente une minorité d’opérations mais reste significatif en termes de surface construite”, estime-t-il. Pour de ne pas complexifier le dispositif, “prévu comme expérimental et ‘souple'”, il est par ailleurs proposé de ne pas cadrer excessivement le contenu de l’étude. Celle ci comporte les volets suivants :
– l’identification du projet (localisation, maître d’ouvrage et personne ayant réalisé l’étude, caractéristiques générales du projet : surface initiale ou projetée) ;
– l’évaluation du potentiel de changement de destination et d’évolution en lui-même qui doit tenir compte des contraintes internes et externes au projet (réglementations nationales et locales, environnement urbain – tenant compte des objectifs de densification, d’optimisation du foncier disponible et de production de logements et des mobilités -, critères architecturaux ou techniques, réseaux d’eau et d’énergie du bâtiment…) ;
– la description d’un ou plusieurs scénarios exposant les évolutions ou changements de destination envisagés (notamment de gabarit), éventuellement leur temporalité, les travaux nécessaires et leurs impacts économiques et environnementaux (production de déchets et consommation de matière première) par rapport au scénario contrefactuel ;
– et en conclusion, le ou les scénarios privilégiés, et le cas échéant la justification de l’impossibilité de proposer un changement de destination ou une évolution, notamment “en cas de disproportion économique ou d’impossibilité technique”.
Les qualifications décrites pour réaliser l’étude préalable ciblent principalement les professions d’architecte ou d’ingénieur du bâtiment. Le projet de texte détaille également les modalités de preuves que la personne compétente devra fournir au maître d’ouvrage. Il précise en outre les informations que doit contenir l’attestation remise au maître d’ouvrage et les modalités de sa transmission par ce dernier aux services de l’État compétents dans le département (DDT-M), avant le dépôt de la demande du permis de construire. Précision importante : la loi ne prévoit pas que l’attestation soit jointe au permis de construire. “Elle ne pourra donc pas être exigée lors de l’instruction du permis”, souligne la notice. Seule l’attestation est à transmettre systématiquement. Le texte prévoit toutefois qu’à la demande de l’administration, le maître d’ouvrage doive transmettre l’étude complète.
Cas de la démolition
L’article R.126-14-1 du CCH est modifié pour intégrer l’étude de pré-démolition mentionnée au L.126-35-1. Pour rappel, le maître d’ouvrage est déjà tenu de transmettre au Centre scientifique et technique du bâtiment (CSTB), dans le cas d’une démolition ou d’une rénovation significative d’un bâtiment, le diagnostic “PEMD” et le formulaire de récolement des travaux mis en œuvre dans le bâtiment. L’étude du potentiel de changement de destination et d’évolution du bâtiment sera donc jointe au diagnostic “PEMD”, préalablement aux travaux de démolition. La plateforme de collecte des formulaires et diagnostic “PEMD” (gérée par le CSTB) aura vocation à accueillir l’étude ainsi visée. Son contenu est identique à celui décrit dans le cas de la construction. Il en est de même concernant les compétences requises de la part des personnes chargées de sa réalisation. Quant au périmètre, il est déjà décrit dans la loi (bâtiment nécessitant la réalisation du diagnostic “PEMD”).
Sont concernés par cette nouvelle obligation, les bâtiments faisant l’objet de travaux de construction et de travaux de démolition dont les demandes d’autorisation d’urbanisme sont déposées “à compter du 1er juillet 2024″, ou, à défaut, dont la date d’acceptation des devis ou de passation des marchés relatifs aux travaux de démolition “est postérieure au 1er juillet 2024”. Sont en revanche exonérés de la réalisation de cette étude, les projets de démolitions de bâtiment à usage d’habitation appartenant à un organisme HLM ayant reçu les accords préalables à leur démolition, prévus à l’article L.443-15-1 du CCH avant le 1er juillet 2024.
Source : www.banquedesterritoires.fr